La consommation numérique au quotidien: quel impact réel?

Fruit d’une collaboration scientifique entre un étudiant, des membres du CIRODD et un acteur terrain, un article paru dans le périodique Sustainable Production and Consumption établit que l’envoi de courriels et le streaming contribuent de façon marginale à l’empreinte carbone annuelle des utilisateurs.

 

Prémisse de départ : Depuis quelques années, nombreux sont les médias à avoir soulevé l’impact faramineux de l’envoi et du stockage de courriels sur les émissions globales de CO2. Bien que 140 milliards de courriels soient échangés chaque jour, leur impact environnemental ferait, dans bien des cas, l’objet d’une forme d’exagération et d’incompréhension. L’apparente immatérialité des services numériques masquant les impacts réels des technologies de l’information et de la communication (TIC), il s’avère donc difficile de savoir quels gestes concrets poser en vue de réduire son propre impact environnemental.

Courriels : un de plus, un de moins

Internet pollue, certes. Les TIC nécessitent des quantités importantes de ressources et d’énergie pour alimenter toutes les infrastructures liées à l’utilisation des données numériques et des appareils électroniques des utilisateurs. « Ça représente environ 5% de la consommation électrique globale, notamment avec l’avènement du 5G et de l’Internet des objets, » souligne Mohamed Cheriet, professeur titulaire au Département de génie des systèmes de l’École de technologie supérieure (ÉTS), directeur général du CIRODD et ex-détenteur de la Chaire canadienne eco-cloud.

On parle beaucoup d’activités numériques, mais on utilise trop souvent de mauvaises données pour les quantifier, soutiennent dans leur article M. Cheriet, Luciano Rodrigues Viana, Doctorant en sciences de l’environnement à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC); Kim-Khoa Nguyen, membre du CIRODD et professeur au Département de génie électrique de l’ÉTS; Jean-François Boucher, membre du CIRODD et professeur au Département des sciences fondamentales de l’UQAC et Daria Marchenko, fondatrice et présidente de l’Écoist Club, un projet d’impact social sensibilisant aux enjeux de l’écologie numérique.

« On a donc élaboré un calculateur simple nous permettant de quantifier les impacts environnementaux liés à l’utilisation des services numériques et à l’empreinte carbone de la fabrication d’appareils électroniques. » L’objectif? Sensibiliser les utilisateurs canadiens à l’impact réel de la numérisation de la vie de tous les jours et informer les internautes sur les bénéfices à changer certains comportements afin d’aider le secteur des TIC à réduire ses émissions.

Proposant une méthodologie à deux piliers qui repose d’une part sur la quantité d’électricité requise à la transmission et au stockage de données numériques et d’autre part, sur l’empreinte carbone associée à la fabrication de l’équipement électronique et à l’utilisation dudit équipement, la cellule de recherche a pu constater dans son étude que l’envoi de courriels et de textos via des applications comme Whatsapp sont des activités numériques qui ne consomment pas beaucoup lorsqu’on dresse un portrait de la situation dans son ensemble.

« Le véritable problème repose dans la fabrication des appareils électroniques, en raison notamment de l’extraction et de la transformation des minéraux indispensables à leur fabrication (or, argent, cuivre, cobalt, lithium, terres rares et autres) et nécessitant une très grande quantité d’énergie. C’est là où l’impact est considérable et où, individuellement, nous pouvons faire une différence, » soutient M. Rodrigues Viana. « Par exemple, on soulève souvent l’impact des plateformes de streaming qui se situe autour de 2% de la consommation électrique mondiale, alors qu’il faut notamment focaliser sur les appareils nécessaires au streaming,» précise M. Cheriet. Les réels impacts environnementaux sont liés au contenu numérique, mais aussi à la fabrication des télévisions, des ordinateurs et des téléphones intelligents qui nous permettent de binge-watch des séries sur Netflix ou d’écouter de la musique sur Spotify.

Trois choses à faire pour réduire son empreinte en tant qu’utilisateur

Il est nécessaire que les fournisseurs de données numériques, les fabricants d’appareils électroniques et les utilisateurs mettent en œuvre des actions concrètes pour que l’industrie numérique devienne un allié dans la réduction des impacts environnementaux de systèmes économiques.

D’un point de vue individuel cependant, il est possible d’acheter de nouveaux appareils électroniques que lorsqu’on en a véritablement besoin, de s’informer au sujet de la fabrication de ceux-ci et de veiller à ce qu’ils respectent au mieux certains standards environnementaux et sociaux et finalement, lorsqu’on les achète, s’assurer de les conserver le plus longtemps possible.